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Les Critiques de Films de Kaal, Roxy & Cie.
30 avril 2011

L'Oiseau au Plumage de Cristal

Le film du mois d'Avril est :

L'oiseau au Plumage de Cristal

 


loiseau_au_plumage_de_cristal 

Sortie dans les salles italiennes en 1970

 Disponible en DVD dans plusieurs éditions (FNAC Les Introuvables pour la plus récente, TF1 Vidéo...)

 

 Réalisé par : Dario Argento

 Avec : Tony Musante, Suzy Kendall, Enrico Maria Salerno, Eva Renzi...

 Film italo-allemand

 Genre : Rome sous le joug d'un tueur fou

 Durée : 1h38

 

Synopsis :

Sam Dalmas est un écrivain américain vivant à Rome avec sa petite amie Julia, mannequin. La nuit précédant son retour aux États-Unis, il est témoin de l'agression d'une femme par un mystérieux individu vêtu d'un imperméable noir. Essayant de lui porter secours, il est piégé entre les deux portes automatiques d'une galerie d'art et ne peut qu'observer pendant que l'assaillant s'enfuit. La femme, Monica Ranieri, épouse du patron de la galerie, survit à l'attaque, mais la police confisque le passeport de Sam pour l'empêcher de quitter le pays, pensant qu'il pourrait être un important témoin. Sam est alors hanté par ce qu'il a vu cette nuit-là, persuadé qu'un élément important lui échappe. Lui et son amie deviennent les nouvelles cibles du mystérieux agresseur.

 

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C'est quoi ce film ?!


Question complexe pour un film aussi important pour le cinéma policier tout comme pour le cinéma d'horreur.  En 1969, un certain Dario Argento - critique de cinéma et accessoirement co-scénariste du monumental Il Etait une fois dans l'Ouest de Sergio Leone - est en passe de renouveler la façon de concevoir le cinéma populaire. L'un des scénaristes du western de Leone lui conseille de lire - pour son plaisir - The Screaming Lili, un roman policier de Fredric Brown, qui deviendra la base solide du scénario de L'Oiseau au Plumage de Cristal. Mais Dario Argento ne compte pas le réaliser, son truc pour l'heure est surtout l'écriture. Face aux refus successifs des producteurs, son père décide de le produire à condition que son rejeton le mette en scène (sa famille est dans le milieu artistique, au passage) ! Voila pour les prémisses, parlons maintenant du film lui-même.

L'Oiseau au Plumage de Cristal est un giallo, c'est-à-dire un thriller italien teinté d'éléments violents et/ou sadiques qui le rapproche du cinéma d'horreur. Ce genre de film, dont l'origine du mot signifie "jaune" en raison de la couleur des couvertures des romans policiers des années 30 à 60, apparait avec la figure de proue Mario Bava dans les années 60. Citons entres autres références du genre, La fille qui en savait trop (1963) et Six femmes pour l'assassin (1964). 

Ainsi si le film semble au premier abord n'être qu'un simple film policier, détrompez-vous ! Argento nous entraîne dans un thriller solide, qui plus est dans un environnement moderne où le tueur peut venir de n'importe où. On voit que le réalisateur connait (et aime) Rome par coeur, il filme les rues, les batiments, jusque dans ses endroits les plus inquiétants avec une énergie singulière. Il nous invite à chercher des indices dans le décors, à parler aux personnages comme si l'on se trouvait avec eux. Et pour le coup, c'est très réussi, notamment grâce à un scénario passionant et d'excellents acteurs - Tony Musante et la sublime Suzy Kendall en tête. Malgré le côté sérieux et pervers de l'histoire, Dario Argento ose introduire des notes d'humour qui se marrie parfaitement bien. On retiendra par exemple des seconds rôles savoureux, l'antiquaire homosexuel un peu trop entreprenant, le peintre ermite qui offre gentiment une assiète remplie d'aliments disons peu appétissants. Le film joue de ces décalages d'ambiances, de ces situations anodites au cours d'une enquête qui, elle, ne l'est pas. 

 

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Sur la forme, L'Oiseau au ¨Plumage de Cristal ose également beaucoup de choses. Emboitant le pas à de nombreux films d'horreur, les scènes du tueur nous apparaissent en vue subjectives (respiration maladive en prime), et nous incitent sans prévenir à être complice des meurtres sordides. Ces scènes sont d'ailleurs extrêmement bien mises en scène, d'une violence graphique étonnante, le tout sur une musique de Ennio Morricone - excusez du peu. Pour un premier film, L'Oiseau au Plumage de Cristal fait preuve d'une réalisation moderne, multipliant les inserts et autres gros plans de manière maîtrisée. De plus ce film constitue un pont indéniable entre le cinéma populaire et le cinéma expérimental. Le succès critique et public du film lors de sa sortie (il restera à l'affiche plusieurs années dans certains cinémas) est là pour confirmer une chose : il s'agit d'un divertissement populaire indéniable. Passant d'une discussion de routine sur une enquête, puis par une course poursuite haletante, pour finir par une scène sanglante et opressante, tout y passe. Un bijou de suspense considérable.

On retrouve un autre ingrédient que Dario Argento reprendra pour ses autres films, à savoir l'intérêt pour l'art. En effet, le premier crime a lieu dans une galerie d'art moderne. Mais il y a aussi ce tableau troublant, objet de perversion qui incite à tuer une fois qu'on le regarde - un élément par ailleurs mincement fantastique qui entretient le mystère. Son amour pour l'art et plus particulièrement la peinture, Dario Argento le répercute sur sa façon de filmer, il fige la réalité par des arrêts sur image, ses scènes de meurtres semblent inspirées des grands peintres romantiques avec comme différence notoire, l'aspect fétichiste (les gants noirs...). On pourrait ainsi parler du cinéma de Dario Argento comme d'une peinture en mouvement, tant l'exercice de style est réussi. Pour faire simple, un film en tout points magistral.

 

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Avec une telle réussite, la carrière du réalisateur démarre logiquement, perfectionnant son art de film en film dans les années 1970-80-90 (la qualité de ses derniers films est très discutable). Il lance par la même occasion un engouement populaire à l'égard du giallo. Cependant le film est un rescapé : de par sa réalisation audacieuse qui se détache des conventions du genre, un ponte du studio Titanus voulait reprendre à zéro avec un autre réalisateur, avant que le père de Dario Argento intervienne. Bien lui en a pris !

 

Dr. Gonzo


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